Quand le management en entreprise vire à la tragédie antique !

Publié le 24 juillet 2018
Management / Prospective

« Hélas ! » 18 fois « Hélas ! »

« Marre du foot ? » C’est ce qui nous disions dans notre spot sur BFM !

Le moment de relire ses classiques ?

On jouait récemment « Bérénice », la pièce de Jean Racine, au Théâtre National de l’Odéon…

Vous vous souvenez. Titus et Bérénice. Titus aime Bérénice. Bérénice aime Titus. Il est empereur. Elle est reine. Et pourtant. Patatras ! Egoïsme ou lâcheté des hommes ? Vicissitudes du pouvoir ? Bérénice est renvoyée comme une mal propre chez elle en Palestine…

Titus dit « Ah, Rome! Ah, Bérénice! Ah, prince malheureux!Pourquoi suis-je empereur? Pourquoi suis-je amoureux? ».

Bérénice répond « Hélas ! ». Titus répond lui aussi « Hélas ! ».

Extraits

Acte quatrième

Scène V

Titus, Bérénice

Bérénice, en sortant. Non, laissez-moi, vous dis-je ; En vain tous vos conseils me retiennent ici, Il faut que je le voie. Ah ! Seigneur, vous voici ! Eh bien ? il est donc vrai que Titus m’abandonne ? Il faut nous séparer ; et c’est lui qui l’ordonne !

Titus N’accablez point, Madame, un prince malheureux. Il ne faut point ici nous attendrir tous deux. Un trouble assez cruel m’agite et me dévore, Sans que des pleurs si chers me déchirent encore. Rappelez bien plutôt ce coeur qui tant de fois M’a fait de mon devoir reconnaître la voix. Il en est temps. Forcez votre amour à se taire, Et d’un oeil que la gloire et la raison éclaire Contemplez mon devoir dans toute sa rigueur. Vous-même, contre vous, fortifiez mon coeur, Aidez-moi, s’il se peut, à vaincre ma faiblesse, A retenir des pleurs qui m’échappent sans cesse ; Ou, si nous ne pouvons commander à nos pleurs, Que la gloire du moins soutienne nos douleurs, Et que tout l’univers reconnaisse sans peine Les pleurs d’un empereur et les pleurs d’une reine. Car enfin, ma Princesse, il faut nous séparer.

Bérénice Ah ! cruel ! est-il temps de me le déclarer ? Qu’avez-vous fait ? Hélas ! je me suis crue aimée. Au plaisir de vous voir mon âme accoutumée Ne vit plus que pour vous. Ignoriez-vous vos lois Quand je vous l’avouai pour la première fois ? A quel excès d’amour m’avez-vous amenée ? Que ne me disiez-vous : « Princesse infortunée, Où vas-tu t’engager, et quel est ton espoir ? Ne donne point un coeur qu’on ne peut recevoir ». Ne l’avez-vous reçu, cruel, que pour le rendre, Quand de vos seules mains ce coeur voudrait dépendre ? Tout l’empire a vingt fois conspiré contre nous. Il était temps encor : que ne me quittiez-vous ? Mille raisons alors consolaient ma misère : Je pouvais de ma mort accuser votre père, Le peuple, le sénat, tout l’empire romain, Tout l’univers, plutôt qu’une si chère main. Leur haine, dès longtemps contre moi déclarée, M’avait à mon malheur dès longtemps préparée. Je n’aurais pas, Seigneur, reçu ce coup cruel Dans le temps que j’espère un bonheur immortel, Quand votre heureux amour peut tout ce qu’il désire, Lorsque Rome se tait, quand votre père expire, Lorsque tout l’univers fléchit à vos genoux, Enfin quand je n’ai plus à redouter que vous.

Titus Et c’est moi seul aussi qui pouvais me détruire. Je pouvais vivre alors et me laisser séduire ; Mon coeur se gardait bien d’aller dans l’avenir Chercher ce qui pouvait un jour nous désunir. Je voulais qu’à mes voeux rien ne fût invincible, Je n’examinais rien, j’espérais l’impossible. Que sais-je ? j’espérais de mourir à vos yeux, Avant que d’en venir à ces cruels adieux. Les obstacles semblaient renouveler ma flamme, Tout l’empire parlait, mais la gloire, Madame, Ne s’était point encor fait entendre à mon coeur Du ton dont elle parle au coeur d’un empereur. Je sais tous les tourments où ce dessein me livre, Je sens bien que sans vous je ne saurais plus vivre, Que mon coeur de moi-même est prêt à s’éloigner, Mais il ne s’agit plus de vivre, il faut régner.

Bérénice Eh bien ! régnez, cruel, contentez votre gloire : Je ne dispute plus. J’attendais, pour vous croire, Que cette même bouche, après mille serments D’un amour qui devait unir tous nos moments, Cette bouche, à mes yeux s’avouant infidèle, M’ordonnât elle-même une absence éternelle. Moi-même j’ai voulu vous entendre en ce lieu. Je n’écoute plus rien, et pour jamais : adieu… Pour jamais ! Ah, Seigneur ! songez-vous en vous-même Combien ce mot cruel est affreux quand on aime ?

Dans un mois, dans un an, comment souffrirons-nous, Seigneur, que tant de mers me séparent de vous ? Que le jour recommence et que le jour finisse, Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice, Sans que de tout le jour je puisse voir Titus ? Mais quelle est mon erreur, et que de soins perdus ! L’ingrat, de mon départ consolé par avance, Daignera-t-il compter les jours de mon absence ? Ces jours si longs pour moi lui sembleront trop courts.

Titus Je n’aurai pas, Madame, à compter tant de jours. J’espère que bientôt la triste Renommée Vous fera confesser que vous étiez aimée. Vous verrez que Titus n’a pu, sans expirer…

Bérénice Ah Seigneur ! s’il est vrai, pourquoi nous séparer ? Je ne vous parle point d’un heureux hyménée ; Rome à ne plus vous voir m’a-t-elle condamnée ? Pourquoi m’enviez-vous l’air que vous respirez ?

Titus Hélas ! vous pouvez tout, Madame : demeurez, Je n’y résiste point. Mais je sens ma faiblesse : Il faudra vous combattre et vous craindre sans cesse, Et sans cesse veiller à retenir mes pas, Que vers vous à toute heure entraînent vos appas. Que dis-je ? En ce moment mon coeur, hors de lui-même, S’oublie, et se souvient seulement qu’il vous aime.

Bérénice Eh bien, Seigneur, eh bien ! qu’en peut-il arriver ? Voyez-vous les Romains prêts à se soulever ?

Titus Et qui sait de quel oeil ils prendront cette injure ? S’ils parlent, si les cris succèdent au murmure, Faudra-t-il par le sang justifier mon choix ? S’ils se taisent, Madame, et me vendent leurs lois, A quoi m’exposez-vous ? Par quelle complaisance Faudra-t-il quelque jour payer leur patience ? Que n’oseront-ils point alors me demander ? Maintiendrai-je des lois que je ne puis garder ?

Bérénice Vous ne comptez pour rien les pleurs de Bérénice !

Titus Je les compte pour rien ? Ah ciel ! quelle injustice !

Bérénice Quoi ? pour d’injustes lois que vous pouvez changer, En d’éternels chagrins vous-même vous plonger ? Rome a ses droits, Seigneur : n’avez-vous pas les vôtres ? Ses intérêts sont-ils plus sacrés que les nôtres ? Dites, parlez.

Titus Hélas ! que vous me déchirez !

Bérénice Vous êtes empereur, Seigneur, et vous pleurez !

Titus Oui, Madame, il est vrai, je pleure, je soupire, Je frémis. Mais enfin, quand j’acceptai l’empire, Rome me fit jurer de maintenir ses droits : Je dois les maintenir. Déjà plus d’une fois, Rome a de mes pareils exercé la constance. Ah ! si vous remontiez jusques à sa naissance, Vous les verriez toujours à ses ordres soumis : L’un, jaloux de sa foi, va chez les ennemis Chercher, avec la mort, la peine toute prête ; D’un fils victorieux l’autre proscrit la tête ; L’autre, avec des yeux secs et presque indifférents, Voit mourir ses deux fils, par son ordre expirants. Malheureux ! mais toujours la patrie et la gloire Ont parmi les Romains remporté la victoire. Je sais qu’en vous quittant le malheureux Titus Passe l’austérité de toutes leurs vertus, Qu’elle n’approche point de cet effort insigne, Mais, Madame, après tout, me croyez-vous indigne De laisser un exemple à la postérité, Qui sans de grands efforts ne puisse être imité ?

Bérénice Non, je crois tout facile à votre barbarie. Je vous crois digne, ingrat, de m’arracher la vie.

De tous vos sentiments mon coeur est éclairci ; Je ne vous parle plus de me laisser ici. Qui ? moi, j’aurais voulu, honteuse et méprisée D’un peuple qui me hait soutenir la risée ? J’ai voulu vous pousser jusques à ce refus. C’en est fait, et bientôt vous ne me craindrez plus. N’attendez pas ici que j’éclate en injures, Que j’atteste le ciel, ennemi des parjures ; Non ; si le ciel encore est touché de mes pleurs, Je le prie en mourant d’oublier mes douleurs. Si je forme des voeux contre votre injustice, Si devant que mourir la triste Bérénice Vous veut de son trépas laisser quelque vengeur, Je ne le cherche, ingrat, qu’au fond de votre coeur. Je sais que tant d’amour n’en peut être effacée, Que ma douleur présente, et ma bonté passée, Mon sang, qu’en ce palais je veux même verser, Sont autant d’ennemis que je vais vous laisser ; Et, sans me repentir de ma persévérance, Je me remets sur eux de toute ma vengeance. Adieu.

Racine, Bérénice

Que c’est bon de se replonger dans nos années du collège !

Hélas ! Ce mot rythme la pièce de Racine. « Hélas ! » est répété 18 fois. Qui dit mieux ?

Beaucoup de situations rencontrées dans les entreprises sont des situations inextricables. Comme dans la pièce de Jean Racine, cela crie, cela pleure. On se fait des promesses, on se trahit…On se dit « ses 4 vérités », on s’engueule ou on se méprise. C’est selon… Parfois les portes claquent… On se dit « Adieu » ou des choses pires même …

Plus grave encore la situation où les gens ne se parlent plus. S’ignorent ou s’insultent en silence. Petites ou grandes haines ordinaires …de la vie de bureau.

Bien sûr, nous, les managers de transition, n’avons pas le monopole de ces situations. Les managers salariés les subissent également. Subir …c’est bien le mot. Subir le poids du passé, des non-dits, des habitudes, des troubles du comportement et aussi parfois du n’importe quoi.

Comment inverser la tendance ? Comment ne pas subir ? Inverser « la loose » ? Contrecarrer ce sentiment de découragement qui nous atteint parfois face à la montagne à déplacer ? Comment ne pas dire « Hélas ! » ? Que dire à la place ? Comment remotiver les troupes ? En commençant par se remotiver soi-même ?

Nous avons interrogé plusieurs Directeurs Financiers de notre réseau. Des personnes expérimentées …Des battants… Plusieurs d’entre eux ont proposé des solutions. Chacun avec sa sensibilité et son humour…

Que diraient-ils à la place de ce fameux « Hélas » ?

Verbatim

1/ Flibustier : « A l’abordage ! »

2/ Vieux sage : « Demain il fera jour ! » ou Madame Soleil « Après la pluie vient le beau temps ! »

3/ Comme Nelson Mandela : « Je ne perds jamais. Soit je gagne soit j’apprends ! »

4/ Vantard : « Même pas peur ! »

5/ Lucide : « Napoléon, lui aussi, a beaucoup été trahi … »

6/ Rebelle : « Mort aux vaches ! »

7/ Général : « Nous avons perdu une bataille mais pas perdu la guerre ! »

8/ Trader : « Un de perdu…10 de retrouvés »

9/ Façon Michel Polnareff : « On ira tous au paradis … »

10/ Façon gréviste de la SNCF : « Sans Nous C’est Foutu ! »

11/ Religieux contemplatif : « Dieu soit loué ! » ou fataliste « Mektoub ! »

12/ Supporter de l’Olympique de Marseille : « Droit au but ! »

13/ Façon Geek : « C’est quoi déjà le code wifi ? »

14/ Façon Astérix chez les Normands : « Par Thor ! Par Odin ! »

15/ Façon Emmanuel Macron « Il faut nous mettre …En Marche ! »

16/ Façon Groupe International « Terrific ! Fantastic ! »

17/ Sportif : « Hip ! Hip ! Hip ! »

18/ Façon entreprise libérée : « Un bounty pour celui qui gagne le tournoi de ping-pong ? »

Et vous ? Que diriez-vous à la place d’« Hélas » pour remotiver tout le monde après les petites tragédies du quotidien ?

A vous de jouer maintenant !

David BRAULT

Objectif CASH

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